E-santé : donner le pouvoir d’agir aux patients

Des consultations médicales en ligne, aux bracelets connectés, les solutions numériques et intelligentes s’invitent petit à petit dans notre quotidien et commencent à bouleverser nos habitudes.
Santé connectée, télémédecine, parcours de soins coordonnés, système d’information en santé… L’e-santé ou la santé numérique recouvre plusieurs notions. Éclairage.

6 articles à découvrir
  1. L'e-santé : qu'est-ce que c'est ?

  2. Une réponse aux défis du système de santé

  3. Télémédecine, un volet incontournable de l’ e-santé

  4. Quelle prise en charge pour la téléconsultation ?

  5. Quelles perspectives pour l'e-santé ?

  6. Des réticences persistent

  1. L'e-santé : qu'est-ce que c'est ?

    Au sens large, la e-santé englobe l'ensemble de services et usages s'appuyant sur le numérique pour gérer la santé des usagers de manière optimisée et personnalisée, et pour permettre aux professionnels de santé de mieux s'informer, se coordonner dans la prise en charge du patient.

    Elle s'appuie sur les activités, services et systèmes appliqués aux domaines de la santé, du médico-social et du social, pratiqués à distance au moyen des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC).

  2. Une réponse aux défis du système de santé

    Le système de santé français fait face à de profonds bouleversements liés au vieillissement de la population, à l'augmentation du nombre de patients atteints de pathologies chroniques, à la chute de la démographie, et à un contexte financier de plus en plus contraint…

    Face à ces défis, les pouvoirs publics ont la volonté de promouvoir l’e-santé comme un puissant levier d’efficience, et portent un soutien fort à l’évolution du systèmes d’information en santé, à travers des programmes nationaux et régionaux (Hop’EN, Dossier Patient Informatisé, e-Parcours, e-Prescription, etc.).

    Par cette accélération numérique et le recours aux méga données, la e-santé pourrait apporter des réponses appropriées, permettant de démocratiser l’accès aux soins, de maitriser les coûts liés aux dépenses de santé, mais aussi de repenser du parcours de soin et l’expérience des patients.

    Les objectifs affichés de l'e-santé
       •   Amélioration de la qualité des soins ;
       •   Accès facilité aux soins notamment en zones de désertification médicale ;
       •   Maintien à domicile et retour rapide à domicile dans des conditions de qualité et de sécurité optimales pour un suivi dans un environnement familier ;
       •   Amélioration des relations entre professionnels de santé et patients, mais également entre les professionnels entre eux et les patients entre eux ;
       •   Efficience du système de santé (maîtrise des coûts de santé),
       •   Formation des professionnels.

    Des produits connectés affluent sur le marché

    Certains relèvent du simple bien-être de la personne (tensiomètres connectés, podomètres intelligents, etc.) et d'autres sont destinés à mesurer et analyser directement sur son smartphone ou sa tablette ses actes quotidiens ou son état de santé (indicateurs biologiques). D'autres encore sont dotés d'une portée médicale forte et s'intègrent à la stratégie de prise en charge du patient : l'aider à bien prendre son traitement, suivre sa fréquence cardiaque de manière continue, mesurer sa glycémie, etc.

    La télémédecine, un volet important de la e-santé

    Elle définit 5 champs de compétences : téléconsultation, télé expertise, télésurveillance médicale, téléassistance médicale, et réponse médicale apportée dans le cadre de la régulation médicale.

    Depuis l’épidémie de la COVID-19, le déploiement accéléré de la télémédecine s’avère sa véritable valeur et les praticiens et les patients y sont de plus en plus favorables.

  3. Télémédecine, un volet incontournable de l’ e-santé

    La télémédecine a enfin vu une explosion d’usage dans le contexte historique de la crise sanitaire en 2020. État des lieux.

    Un marché en plein essor

    Depuis sa reconnaissance en droit français en 2009, la télémédecine est longtemps restée cantonnée aux expérimentations.

    C'est en septembre 2018 qu'un tournant s'opère: la téléconsultation entre dans le droit commun, puis la téléexpertise en février 2019, dans le cadre du Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

    A ce jour, seule la télésurveillance reste en mode expérimentation (depuis 2018 et ce pour une durée de 4 ans).

    Téléconsultation : un usage en pleine expansion

    La crise sanitaire sans précédent à laquelle nous faisons face a suscité partout en France le recours aux outils de télémédecine de manière brutale et accrue. En parallèle, les pratiques et la réglementation de la télémédecine ont connu de profondes modifications afin de répondre à la crise sanitaire. Les modalités de prise en charge des actes de téléconsultation, tant par l’assurance maladie que par l’organisme complémentaire de santé, ont ainsi assouplies pour répondre à l’urgence médicale nationale.

    Le nombre mensuel de téléconsultations explose :



    Sans surprise, selon les statistiques de l'Assurance maladie, le nombre de téléconsultations remboursées entre mars et avril 2020 par l'Assurance maladie s'élève à 5,5 millions. 

    Au plus fort de la crise, en avril 2020, les téléconsultations ont représenté jusqu'à 27 % des consultations physiques et à distance. Par semaine, le nombre de téléconsultations a atteint près d'un million. Par comparaison, avant les mesures de confinement début mars 2020, elles représentaient quelques milliers seulement par semaine.

    L’intérêt de la télémédecine au-delà de l’accès au soin

    Rappelons qu'historiquement, l'intérêt de la télémédecine se situe à trois niveaux :

       •   Elle assure la continuité de l'accès aux soins pour une partie importante de la population, notamment sur les territoires « déserts médicaux » ;

       •   C'est un outil précieux pour désengorger les services d’urgence médicale ;

       •   Sa mise en œuvre favorise les réseaux multidisciplinaires dont la médecine de demain aura besoin.

    Dans l'avenir, par sa composante « télésurveillance médicale », elle permettra également d’établir un diagnostic, d’assurer un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique pour un patient à risque, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits de santé ou des prestations, ou d’effectuer une surveillance de l’état de santé des patients.

    Il s’agit ainsi de développer un accompagnement adapté et personnalisé aux personnes en fonction de leur besoin. La future télémédecine s’appuiera sur les données de santé pour proposer des plans de soins personnalisés, grâce aux dispositifs médicaux connectées et à l’intelligence artificielle. Intégrée à une organisation interprofessionnelle optimisée, elle devra s’inscrire au sein d’un parcours de vie de manière préventive et globale.

    Peut-être dépassera-t-elle la santé au sens strict, pour englober l’activité physique, la nutrition, la protection face à la pollution, la vaccination, ou encore l’adaptation de la mobilité ?

    Lire ici le rapport établi par la l'Assurance Maladie pour 2021, juillet 2020

  4. Quelle prise en charge pour la téléconsultation ?

    Parmi les solutions e-santé, la téléconsultation est le seul service pris en charge par l’Assurance maladie Obligatoire, à hauteur de 70 % (hors dépassements d’honoraires), dans le cadre du parcours de soins. Les tarifs appliqués sont les mêmes qu’il s’agisse d’une consultation ou d’une téléconsultation. Les complémentaires santé prennent alors en charge le ticket modérateur dans les conditions de droit commun.

    Avant la crise sanitaire COVID-19, pour être éligible au remboursement par l’Assurance maladie, tout acte de téléconsultation devait remplir l’un de ces critères suivants :
       •   Le patient devait avoir consulté le professionnel de santé en présentiel au cours des 12 derniers mois ou lui être adressé par son médecin traitant ;
       •   Le patient devait être âgé de moins de 16 ans. S'il n'avait pas de médecin traitant ou que celui-ci n'est pas disponible dans un délai raisonnable, il pouvait alors contacter un médecin du territoire (CPTS) pour une téléconsultation. Cet acte traité à l'échelle territoriale, était ainsi intégré au parcours de soins coordonné ;
       •   Le patient devait consulter un médecin spécialiste en accès direct : gynécologue, ophtalmologiste, stomatologue, chirurgien maxillo-facial, psychiatre, pédiatre ;
       •   Le patient devait résider au sein des Etablissements sociaux et médico-sociaux, il est détenu ou en retenue administrative.

    Nouvelles modalités de prises en charge par l'Assurance maladie depuis mars 2020 de la téléconsultation

    Ces conditions d'accès assouplies avec l'épidémie de COVID-19, la prise en charge de la téléconsultation à 100 % est entrée en vigueur le 20 mars 2020. L'avant-projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 prévoit de prolonger cette prise en charge "jusqu'au 31 décembre 2022".

    La télémédecine par IPECA 

    En complément de la téléconsultation prise en charge par l'Assurance maladie, les participants d'IPECA assurés en prévoyance et santé, bénéficient également des services de télémédecine gratuits et illimités, grâce au partenariat mené avec MedecinDirect et DeuxièmeAvis, deux acteurs leaders dans ce marché (pour en savoir plus, rendez vous dans votre Espace Privé).

    Peu d'actes ou de services établis par des applications mobiles ou de la santé connectée sont remboursés par l'Assurance maladie et les complémentaires santé. Mais face à ce phénomène en pleine expansion, la situation est en train d'évoluer progressivement.

    Et la télésurveillance

    Dans le cadre de l'expérimentation ETAPES, les modalités de financement de télésurveillance médicale pour les patients en affection longue durée (ALD) sont déjà élaborées. 

    En outre, le conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) préconise une prise en charge "par la collectivité", une fois la distinction établie entre les simples gadgets ou applications "bien être" et les offres médicalement utiles. Bref, si bénéfices il y a, les assureurs santé, de leur côté, suivent ce dossier de près.

    Alors, la santé connectée, bientôt une composante des offres de couverture santé? Affaire à suivre… 

  5. Quelles perspectives pour l'e-santé ?

    L'avènement de l'ère numérique ouvre de nouvelles opportunités à la santé et à notre société, tant pour les patients et leurs familles que pour les professionnels. Dans un futur proche, les solutions e-santé porteront une réponse prometteuse à se soigner autrement, et à agir préventivement aux défis médicaux et sociétaux.

    Une relation médecin-patient enrichie

    La santé numérique, telle qu’elle s’inscrit progressivement dans le parcours de vie, promet un nouveau type de relation entre le patient et l’ensemble du corps médical, particulièrement pour ceux qui souffrent de maladies chroniques. De son domicile ou lors de ses déplacements, le patient pourra notamment sur sa tablette ou son ordinateur accéder à son dossier médical et dialoguer avec les équipes médicales grâce à l'utilisation d'une  messagerie sécurisée.

    En utilisant des appareils biomédicaux connectés, il aura également la possibilité de :
       •   Suivre son parcours de soins et visualiser les analyses de son état de santé ;
       •   Alimenter en continu des données sur ses constantes biologiques, en complément des données médicales mesurées et restituées par les professionnels de santé ;
       •   Recevoir sur les équipements mobiles sécurisés, des notifications d'un rendez-vous, de l'heure de la prochaine prise d'un médicament, ou lui alerter une anomalie nécessitant une visite médicale.

    Autant d’éléments qui devraient simplifier sa vie, et lui permettre de s’impliquer davantage dans le suivi de sa santé au quotidien.

    Pour qui ?
    La population visée par l'e-santé s'élargit de jour en jour notamment chez les seniors. Une récente enquête publié par Accenture montre qu'environ 70 % d'entre eux sont de plus en plus à l'aise avec les nouvelles technologies, et qu’ils surfent volontiers sur internet.


    E-santé, un dispositif de prévention

    Le système de santé français s’est bâti historiquement autour du soin, c’est-à-dire du traitement des épisodes aigus de la maladie, et a délaissé la prévention et l’accompagnement. Le développement des maladies chroniques, le suivi des personnes dépendantes à domicile et le vieillissement de la population nécessitant un suivi au long cours en dehors des phases aigües, viennent bousculer ce paradigme.

    Soigner autrement devient un impératif de notre système de santé dans ce contexte. L’utilisation des nouvelles technologies et applications en santé, selon leurs modalités d’action, vont permettre :
       •   D'identifier les situations à risque susceptibles d’endommager l’état de santé des patients ;
       •   De favoriser des changements de comportement, facteurs essentiels de la prévention des maladies évitables, l’aggravation des maladies déjà développées, et la perte d’autonomie.

    S'inscrivant dans le plan national de la prévention de la perte d'autonomie, décliné dans la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement, de nombreuses applications ont vu le jour depuis quelques années, en citant quelques unes ci-dessous :


    Applications de prévention de la perte d'autonomie

    Dynseo

    Utilisé par plus de 250 institutions clientes et plus de 3 000 seniors à domicile, Dynseo est une plateforme met à disposition des jeux de mémoire aux séniors souffrant de troubles cognitifs et à leur famille. Les usagers peuvent se faire de la rééducation et de la stimulation cognitive tout en se divertissant. Elle permet également aux professionnels de santé de diagnostiquer et repérer les patients atteints de maladies dégénératives grâce à une batterie de tests cognitifs.

    Activie

    Une application imaginée par l'Institut du Vieillissement des Hospices Civils de Lyon et développée par la start-up Lili smart, ACTIVIE est une application qui accompagne les plus de 65 ans sur trois grands leviers de prévention: l'activité physique, le lien social et la nutrition. Accessible sur tous supports (smartphone, tablette, ordinateur), l'application propose chaque jour des objectifs personnalisés pour aider à "bien vieillir", rester en forme et profiter de son quartier.

    WatcHelp

    Accompagnée d'une montre connectée, WatcHelp est une application destinée au couple aidant-aidé et favorise l'autonomie de la personne Alzheimer ou autiste. L'application permet de programmer un planning des tâches que la personne malade d'Alzheimer ou autre doit réaliser (prendre son repas, faire sa toilette...), avec des rappels en temps réel.

    E-santé, un dispositif d'accompagnement aux aidants

    Aujourd'hui, 8,3 millions de personnes de 16 ans ou plus occupent la fonction d'aidant, accompagnant des proches dépendants ou invalides au quotidien.

    Les nouveaux services e-santé créés pour répondre aux besoins d'aidants, leur permettent de trouver du soutien à travers l'appui de différents portails d'information et d'accompagnement ou de ressources en ligne, telles que des formations gratuites et accessibles à tout moment. Disposer d'informations rend aux aidés et aux aidants une plus grande autonomie et une meilleure proactivité quelles que soient les étapes du parcours de santé.

  6. Des réticences persistent

    Toutefois, si l’intérêt pour l’e-santé est grandissant, une méfiance persiste. En effet, l’utilisation de solutions numériques dans la prise en charge de santé et du bien-être soulèvent des questions face à l’ouverture des données de santé, en raison du caractère sensible de ces « données » et des contraintes réglementaires qui pèsent sur elles.

    Bon nombre d’informations transitent via ces outils parfois même sans que les utilisateurs en soient conscients : nom, prénom, âge, sexe, habitudes alimentaires, rythmes du sommeil, poids, tension comportements d'achat, trajets courants, types de transports, relations sociales, mais aussi géolocalisation, pratiques sportives... Quelle fabuleuse opportunité pour les sociétés qui les agrègent d’en apprendre davantage sur leurs clients et la manière dont ils vivent et consomment.

    Or, dans un monde connecté au Big Data, les risques de dérives sont réels. Pas seulement pour des raisons de piratage criminel, mais aussi pour des questions de discrimination. Les utilisateurs peuvent par exemple craindre de se voir refuser une assurance ou un prêt bancaire en cas d’index glycémique élevé, de léger surpoids ou d’alimentation déséquilibrée.

    Un récent baromètre montre d’ailleurs que les patients et les praticiens ont des avis mitigés quant à ces appareils. La moitié des médecins les considèrent comme une « menace » pour le secret médical… même si 81 % d’entre eux estiment qu’ils constituent une opportunité pour la qualité de soins et 93 % un outil de prévention efficace. Rares sont les praticiens à en prescrire. De leur côté, les utilisateurs ne sont pas opposés au principe de partager les données traitées par ces robots avec les professionnels (médecins et pharmaciens). Seul un Français sur dix s’y opposerait.

    Un meilleur cadrage des pratiques est donc attendu par les patients comme les praticiens pour s’ouvrir vraiment à l’e-santé. D’ailleurs, entre mesure de performances, amélioration du bien-être et réel besoin médical, son champ d’action est loin d’être figé.